Histoire de femmes et de chocolat
17 JANVIER 2012
Article publié dans Le Devoir
Rares sont les sociétés qui existent encore à la troisième génération et à plus forte raison dans le cas des mini-entreprises. Quelques-unes tout de même défient le temps et les contretemps, comme Chocolats Andrée, une histoire de femmes d’un bout à l’autre de ses 71 ans d’existence.
En 1940, avec un père qui vient de décéder et une mère malade, deux sœurs, Madeleine et Juliette, ouvrent une chocolaterie pour ne plus dépendre du confiseur du centre-ville qui les avait embauchées. Il n’était pas très bien vu alors que des femmes soient sur le marché du travail et, craignant de perdre leur emploi, les sœurs décidèrent de prendre leur destinée en main, malgré la Seconde Guerre mondiale qui faisait rage, ce qui entraînait le rationnement de nombreux produits alimentaires, dont le sucre. Ce n’était vraiment pas un bon moment pour lancer une chocolaterie.
Quoi qu’il en soit, ces deux femmes ont plongé dans cette aventure. Elles ont installé leur petite boutique artisanale sur l’avenue du Parc, à proximité de la clientèle bourgeoise d’Outremont, mais aussi voisine d’un secteur industriel qui allait devenir pour elles un fournisseur de sucre, en plus d’apporter une clientèle importante.
En 2011, Chocolats Andrée se trouve toujours au même endroit et la production demeure aussi artisanale qu’elle l’était en 1940. On y utilise encore les deux mêmes fours et les six employés travaillent de la même façon qu’auparavant. En fait, certains d’entre eux sont là depuis 30 ans et plus. Michel Hadd, neveu de Juliette, est maître chocolatier depuis 25 ans. Mme Bernier (Suzanne) y est sauceuse depuis 34 ans, après avoir fait le même travail pendant 20 ans chez Viau, société aujourd’hui disparue qui a inventé le fameux biscuit Whippet. Chaque ganache qu’elle prend dans sa main est trempée dans le chocolat chaud et est sortie aussitôt, et avec la dernière goutte qui pend au bout de son doigt elle signe le chocolat d’une lettre ou d’une élégante clé de sol.
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